Allemagne: sortie anticipée du nucléaire d'ici à 2022

La coalition gouvernementale a décidé dans la nuit du 29 au 30 mai 2011 que le parc nucléaire allemand, soit 17 centrales en tout, serait entièrement découplé du réseau d'ici à 2022. Le gouvernement a ainsi suivi les recommandations de la commission d'éthique «Sichere Energieversorgung» [approvisionnement énergétique sûr] selon lesquelles une sortie du nucléaire serait réalisable en une décennie. Le plan prévoyant l'arrêt des dernières centrales nucléaires à l'horizon 2040 – plan annoncé par le gouvernement il y a sept mois à peine – tombe ainsi dans les oubliettes.

31 mai 2011

Le gouvernement allemand a expliqué ses projets de sortie accélérée lors d'une conférence de presse donnée le 30 mai 2011: la centrale de Krümmel et les sept tranches provisoirement arrêtées dans le cadre du moratoire de trois mois le seront à titre définitif et mises hors service. Six autres tranches devront cesser leur exploitation à la fin de 2021 au plus tard. Les trois centrales les plus récentes – Neckarwestheim 2, Isar 2 et Emsland – pourront, toujours selon le plan gouvernemental, être exploitées jusqu'à fin 2022. Les lacunes dans l'approvisionnement qui résulteront de la suppression de la production nucléaire seront en un premier temps comblées par la construction de centrales à gaz modernes. En cas de pénurie – elle est déjà prédite par la Bundesnetzagentur pour l'Allemagne du Sud en période hivernale –, des centrales nucléaires à l'arrêt serviront de «réserves froides», mais pendant deux ans au plus. La chancelière Angela Merkel a chargé la Bundesnetzagentur de chercher d'autres solutions pour faire face à la menace de pénurie en hiver. Le gouvernement entend par ailleurs porter la part du renouvelable des 17% actuels à 35% d'ici à 2020. En plus du développement accéléré des lignes de transport et de distribution dans le cadre d'une nouvelle loi réglant l'extension des réseaux électriques, une autre loi devra permettre d'accélérer la planification des centrales et des capacités de stockage. L'objectif consiste à produire de manière autonome le courant consommé pour ne pas dépendre des importations d'électricité.

L'impôt sur les assemblages combustibles est maintenu

Décidé en automne 2010, l'impôt sur les assemblages combustibles n'est pas aboli (Bulletin 11/2010). La consommation de combustible nucléaire restera donc assujettie à un impôt direct entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2016.

Rapport final de la commission d'éthique

La commission d'éthique «Sichere Energieversorgung» a remis le 30 mai 2011 à A. Merkel son rapport final «Deutschlands Energiewende – Ein Gemeinschaftswerk für die Zukunft» [Virage énergétique de l'Allemagne – une œuvre commune pour l'avenir] que la chancelière avait demandé en mars 2011. La commission propose en l'espèce de poursuivre l'exploitation des centrales nucléaires allemandes jusqu'à ce qu'une production d'électricité moins risquée vienne remplacer leurs capacités. Lors de la remise du rapport, le professeur Matthias Kleiner, second président de la commission, a confirmé que celle-ci avait la conviction qu'une sortie du nucléaire serait possible en une décennie.

La commission recommande sur 48 pages les modalités permettant de négocier le virage énergétique de manière efficace. Les experts proposent notamment un suivi systématique du processus avec analyses étendues, évaluations et interventions recommandées à chacune des différentes étapes. «Les recommandations de la commission nous serviront de fil rouge pour notre action», a annoncé Merkel.

Les ministres de l'Environnement des länder en faveur d'une sortie rapide

Avant cela, les ministres de l'Environnement des länder s'étaient prononcés en faveur «d'une sortie légale aussi rapide que possible du nucléaire». Ils avaient invité le gouvernement fédéral à présenter un «concept ambitieux et réaliste» de cet abandon et à créer une base légale à partir des rapports de la commission d'éthique, cela afin que les centrales nucléaires concernées par le moratoire restent découplées du réseau de manière durable et juridiquement incontestable. La restructuration de l'approvisionnement énergétique avec un passage du nucléaire au renouvelable devrait, selon eux, être considérablement accélérée. Les ministres ont toutefois souligné que la rapidité du développement ne dépendrait que de l'acceptation de la population. La stratégie devra donc prévoir des mesures permettant d'améliorer cette acceptation et un recours intensifié aux technologies modernes. Il s'agira aussi de renforcer les droits des länder lors de l'extension du réseau d'électricité. Pour ce qui est des nouvelles lignes, il faudra en premier lieu recourir aux tracés d'infrastructure existants.

L'association BDI critique cette décision «politique»

Hans-Peter Keitel, président de la BDI (Bundesverband der Deutschen Industrie), a lancé une mise en garde contre l'abandon irréversible du nucléaire, l'augmentation des prix de l'électricité et le risque de fluctuations critiques du réseau: «Le dessein manifestement politique de vouloir mettre un point final et irréversible – au moyen d'une procédure accélérée sans précédent - à l'utilisation du nucléaire dans ce pays, me préoccupe de plus en plus. Un projet aussi complexe que l'abandon du nucléaire se doit de prévoir la possibilité d'un ajustage postérieur, en termes de calendrier également, car il doit répondre aux critères de la sécurité d'approvisionnement, de rentabilité, de protection du climat et de l'environnement et, de surcroît, être socialement supportable», a-t-il critiqué.

Source

M.A./P.V. d'après le gouvernement allemand, note accompagnant la conférence de presse et communiqué de presse du 30 mai; d'après des communiqués de presse de la commission d'éthique, du FDP et de la BDI du 30 mai 2011

Restez informé-e!

Abonnez-vous à notre newsletter

Vers l’abonnement à la newsletter

Profitez de nombreux avantages

Devenez membre du plus grand réseau nucléaire de Suisse!

Les avantages en tant que membre