Conséquences économiques d'un abandon de l'énergie nucléaire en Suisse

Qu'en coûterait-il à l'économie nationale suisse d'arrêter de manière anticipée les centrales nucléaires conformément aux deux nouvelles initiatives antiatomiques déposées en automne dernier? Les résultats d'une étude scientifique détaillée sur cette question ont été présentés le 22 février 2000 lors d'une conférence de presse des centrales nucléaires suisse à Berne:

21 févr. 2000

Souhaits de bienvenue et introduction

M. Hans Fuchs, président du comité énergie nucléaire (UAK) des Ueberlandwerke (sociétés d'électricité d'importance nationale), directeur des installations thermiques auprès d'Aar et Tessin SA d'Electricité et vice-président de l'ASPEA


Mesdames, Messieurs,

Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue au nom des centrales nucléaires suisses, plus précisément en tant que président du comité de l'énergie nucléaire UAK. L'UAK coordonne les activités et s'occupe des préoccupations communes des centrales nucléaires, ceci à la demande du comité des Ueberlandwerke, les sociétés d'électricité suisses d'importance nationale. C'est d'une telle préoccupation dont nous voudrions vous entretenir aujourd'hui, à savoir de la réponse à la question suivante: Quelles seraient les conséquence d'un abandon de l'énergie nucléaire en Suisse?
Cette question nous a été posée très souvent d'une part dans le contexte des limitations de la durée de vie des centrales nucléaires (éventuellement dans le projet de la nouvelle loi sur l'énergie nucléaire?), d'autre part lors de la collecte des signatures pour les nouvelles initiatives antiatomiques. Elle nous a été posée si souvent qu'au printemps 1999, nous avons décidé de faire établir une expertise à ce sujet. Les Professeurs Pfaffenberger et Borner ont bien voulu répondre à notre demande.
M. Wolfgang Pfaffenberger est professeur des universités de Brême et d'Oldenburg, et en tant que directeur de "l'Institut de l'énergie de Brême", il a analysé les conséquences d'un abandon de l'énergie nucléaire en Allemagne.
M. Silvio Borner est professeur titulaire d'économie nationale et directeur du département de la recherche économique appliquée au Centre des sciences économiques de l'Université de Bâle.
Quels ont été les termes du mandat que nous leur avons confié? Trois scénarios devaient être analysés:

  • "Sortir du nucléaire": arrêt des centrales nucléaires deux ans après l'acceptation de l'initiative,
    respectivement après 30 ans d'exploitation.
  • "Moratoire-plus": arrêt supposé des centrales nucléaires après 40 ans d'exploitation.
  • "Scénario de référence": exploitation de Beznau et de Mühleberg pendant 50 ans, de Gösgen et de
    Leibstadt pendant 60 ans.

Les limitations de la durée de vie des centrales nucléaires (40, éventuellement 50 ans?) lancées sur le tapis par le Conseil fédéral étaient ainsi prises en considération.
MM. Pfaffenberger et Borner vont maintenant vous parler des résultats de leur étude, puis M. Peter Wiederkehr, président du Comité déjà mentionné des Ueberlandwerke, en fera un bref commentaire. M. Wiederkehr est le président de la direction des Forces Motrices du Nord-Est de la Suisse (NOK).

Thèses récapitulatives

Professeur Wolfgang Pfaffenberger, directeur de l'Institut de l'énergie de Brême, Université de Brême


  1. La Suisse dispose d'une production d'électricité très respectueuse de l'environnement, fondée sur la force hydraulique et sur l'énergie nucléaire. Cette production d'électricité n'entraîne aucune nuisance par des agents de pollution de l'air ou par des gaz à effet de serre (CO2). C'est pourquoi le niveau des émissions de gaz à effet de serre en Suisse est particulièrement bas sur le plan international alors que le bien-être matériel est élevé.
  2. Le niveau technique élevé des installations nucléaires suisses permet d'escompter de longues durées de vie restantes, l'autorité de surveillance étant également d'accord sur ce point. Ceci engendrera des coûts de production de l'électricité particulièrement avantageux après l'achèvement de leur période d'amortissement, ou de la prolongation de cette période. La construction des centrales nucléaires coûte cher, mais leur exploitation est d'un prix avantageux. Les frais d'exploitation sont très compétitifs par rapport à d'autres installations de production d'électricité. Dans le contexte de la libéralisation du marché de l'électricité à laquelle la Suisse doit elle aussi se conformer, les centrales nucléaires constituent un élément important de la compétitivité internationale de l'approvisionnement suisse en électricité.
  3. Un abandon de l'énergie nucléaire implique une destruction de capital à grande échelle qui se traduira par des coûts économiques très élevés. Ceux-ci se mesurent aux coûts de production d'électricité les plus avantageux d'énergies de remplacement. A l'heure actuelle, il s'agit des centrales gaz-vapeur à haut rendement fonctionnant au gaz naturel. Si l'abandon du nucléaire aboutit conformément à l'initiative Sortir du nucléaire, son coût atteindra quelque 13,6 milliards de francs. Ce coût s'établirait à 8,8 milliards de francs environ en cas d'abandon selon l'initiative Moratoire-plus.
  4. L'énergie nucléaire constitue une assurance contre les risques de prix sur le marché mondial de l'énergie. Du fait de la forte extension de la production d'électricité à base de gaz naturel dans de nombreux pays européens, pour des raisons de protection du climat, la production d'électricité à partir de gaz naturel est liée à un risque de prix élevé. Ce risque de prix est du même ordre de grandeur que le coût d'un arrêt anticipé des centrales nucléaires. En cas d'évolution défavorable, il pourrait s'ensuivre des coûts supplémentaires de 15,1 milliards de francs avec Sortir du nucléaire, et de 12,5 milliards de francs avec Moratoire-plus.
  5. En cas d'abandon anticipé du nucléaire, la pollution atmosphérique par des substances nocives provenant de la combustion d'agents énergétiques fossiles augmentera. Les centrales de remplacement émettront des oxydes d'azote et du dioxyde de carbone, un gaz à effet de serre. On aboutira par exemple au résultat suivant pour 2010: l'objectif de réduction du Conseil fédéral pour les émissions de CO2 dues à la production d'énergie est de 10% à cet horizon. L'acceptation de Sortir du nucléaire entraînerait au contraire une hausse effective d'environ 6 millions de tonnes de CO2, soit de 13%. Les émissions de NOx augmenteraient également de quelque 9000 tonnes, soit de 8%. La politique de maintien de la pureté de l'air vise une réduction de 45%. Si les émissions dues à la production d'électricité augmentent, il faudra prendre des mesures supplémentaires de réduction des émissions dans d'autres secteurs de l'économie nationale. Pour ce qui est du dioxyde de carbone, gaz à effet de serre, les coûts supplémentaires ainsi entraînés pourraient être à nouveau du même ordre de grandeur que les coûts directs de l'abandon du nucléaire.
  6. L'approvisionnement électrique se fonde en Suisse sur une combinaison de force hydraulique et d'énergie nucléaire. La production d'électricité d'origine hydraulique variant d'une année à l'autre, les contingents d'importation convenus avec l'étranger constituent une réserve de sécurité importante de l'approvisionnement électrique en Suisse. Les importations seront donc, dans l'avenir également, un facteur d'équilibre essentiel de la production d'électricité hydraulique. L'exportation dans d'autres pays européens d'excédents d'électricité d'origine hydraulique, pendant le semestre d'été en particulier, contribue à la réduction de la pollution de l'environnement et présente donc un intérêt écologique. Le produit des exportations constitue en même temps un facteur économique positif pour la Suisse.
  7. Les importations d'électricité ne sauraient remplacer pour autant la production des centrales nucléaires suisses. Il ne serait pas judicieux de fermer des centrales nucléaires sûres et respectueuses de l'environnement en Suisse et d'importer pour cela de l'électricité de centrales nucléaires étrangères partiellement moins sûres, ou de l'électricité de centrales à combustible fossile (à charbon entre autres) qui polluent l'environnement. Pour ce qui est des importations de pays assez éloignés, il faudrait examiner la question de la vulnérabilité des lignes électriques de grande longueur, sans parler des coûts du transport.
  8. Compte tenu des excédents actuels d'exportation d'électricité en Europe, il est naturel que de l'électricité soit disponible en partie à un coût marginal. Ce n'est pas pour autant que les centrales nucléaires existantes deviennent obsolètes sur le plan économique. Du fait de leurs charges d'exploitation peu élevées, elles peuvent au contraire nettement mieux supporter des périodes de difficulté d'une certaine durée que des centrales à combustible fossile, avec leurs dépenses courantes élevées.
  9. Les centrales nucléaires ne sont pas en contradiction avec une utilisation accrue des énergies renouvelables. Selon le point de vue d'experts, les besoins en électricité de la Suisse continueront de progresser de manière modérée dans l'avenir. Une augmentation des besoins exige à long terme des installations de production supplémentaires. Les possibilités variées offertes par diverses sources d'énergie renouvelables constituent une option d'avenir importante pour tous les pays industrialisés. Elles devront continuer d'être développées dans le futur, indépendamment de ce qu'il adviendra de l'énergie nucléaire.
  10. La poursuite de l'exploitation des centrales nucléaires présente d'importants avantages de coûts pour l'économie nationale. Si ces avantages sont mis à profit, on dispose d'autant plus d'argent et de temps pour développer les énergies renouvelables pour l'avenir. Un abandon anticipé de l'énergie nucléaire ne contribuerait donc pas à encourager les énergies renouvelables, mais entraverait au contraire leur développement.

Conséquences économiques pour la Suisse

Professeur Silvio Borner, directeur du département de la recherche économique appliquée au Centre des sciences économiques de l'Université de Bâle


1. Destruction de capital

L'arrêt des centrales nucléaires équivaudrait à une destruction de capital de l'ordre de 9 à 29 milliards de francs suisses
La thérapie politique de choc de l'abandon du nucléaire équivaudrait à la perte de capital engendrée par un tremblement de terre ou par le versement de prestations à l'étranger à titre de réparation. Cette perte serait réelle et inévitable dans la mesure où la destruction ou le transfert de capital productif empêcheraient toute création de valeur sur ce capital. Le démontage et le transfert à l'étranger d'un réseau ferroviaire entraînent par exemple des coûts inévitables, les marchandises devant alors être transportées par des itinéraires détournés plus chers. C'est exactement cela que chiffre l'étude du BEI pour le cas d'un arrêt définitif des centrales nucléaires décidé sur la base de considérations politiques intérieures. La marge des chiffres indiqués s'explique par la combinaison de deux scénarios d'abandon avec deux variantes du prix du gaz. La façon dont le capital ainsi détruit a été financé et amorti ne joue aucun rôle dans cette appréciation de la réalité. La question de savoir si ce dommage est élevé ou faible par tête d'habitant dépend de l'utilité économique ou écologique de l'abandon du nucléaire. En cas de sortie du nucléaire, il faudra malheureusement compter avec des coûts supplémentaires d'ordre aussi bien économique qu'écologique.

2. Coûts pour l'économie nationale

La totalité des coûts pour l'économie nationale d'un abandon du nucléaire est un multiple de la destruction directe de capital
Cette destruction de capital est la limite inférieure absolue des coûts directs. On appelle aussi cela le scénario "rock bottom". C'est en effet en premier lieu sur la base de nouvelles installations gaz-vapeur que l'étude du BEI calcule la solution de remplacement la plus économique. Le conflit qui en résulte avec l'obligation internationale d'une réduction du CO2 de 10% élève indirectement aussi bien le prix de l'abandon du nucléaire que celui de la politique climatique. Les coûts directs de la réduction supplémentaire du CO2 sont évalués dans l'étude à un montant de 7 à 11 milliards de francs supplémentaires. La somme totale de la destruction de capital, du risque du prix du gaz et des coûts directs du CO2 donne les quelque 40 milliards de francs indiqués dans l'étude pour l'initiative "Sortir du nucléaire". Mais les coûts pour l'économie nationale seraient encore plus élevés. L'électricité devenue plus chère entraînerait des décalages de prix, avec des coûts correspondants d'adaptations structurelles. De plus, le reste des milieux économiques devrait réaliser des économies supplémentaires considérables de combustibles fossiles puisque le secteur de l'énergie produirait énormément plus de CO2. Ce frein à la consommation ne pourra s'obtenir que par des augmentations drastiques de prix pour le consommateur final. Ces deux facteurs entraîneront des pertes supplémentaires pour l'économie nationale.

3. Marché de l'électricité libéralisé

Les centrales nucléaires suisses sont capables de survivre sur le plan économique même dans un marché libéralisé de l'électricité
Les centrales hydrauliques et les centrales nucléaires engendrent des coûts fixes élevés mais, du fait des prix relativement bas du combustible, des coûts marginaux faibles. C'est pourquoi elles restent sur le réseau même en cas de forte baisse des prix de l'électricité et fournissent des contributions positives à la couverture des besoins. La dynamique du marché entraînera des problèmes de liquidités et des consolidations, mais certainement pas une destruction réelle de capital comme dans le cas d'un arrêt des centrales. Si les prix de l'électricité ne couvrent pas le coût global à long terme, on renoncera finalement de soi-même à renouveler/remplacer les centrales nucléaires.
Du fait de l'augmentation prévisible des prix des combustibles fossiles d'une part, et d'autre part de la prolongation de la durée de vie technique des centrales nucléaires, les soi-disant "ruines d'investissements" pourraient se transformer très rapidement en grasses prairies pour "vaches à lait". La question du bien-fondé de la décision prise à la fin des années 60 de construire de telles centrales est aujourd'hui entièrement hors de propos et ne présentera encore un intérêt que pour les propriétaires à la fin du cycle de vie des installations.

4. Durées de vie restantes

La fixation de durées de vie totales ou restantes pour l'exploitation des centrales nucléaires ne relève pas de la compétence de la politique
L'Etat suisse est compétent pour les autorisations de construction et d'exploitation des centrales nucléaires. Il édicte et contrôle les exigences très sévères qui sont posées à la sûreté des installations. Les exploitants financent les dispositions nécessaires à cette fin, aussi longtemps que ceci se justifie économiquement. Mais la sûreté ne doit en aucun cas diminuer avec l'avancement de l'âge de l'installation. Si une telle dégradation était constatée, l'autorité compétente devrait immédiatement intervenir sur la base de la législation atomique en vigueur. La fixation préliminaire, au niveau politique, d'une durée d'exploitation restante serait donc contre-productive pour la sûreté et insensée sur le plan économique. Pour une voiture par exemple, l'Etat ne décide pas pendant combien de temps on peut encore conduire un modèle des années 70, mais il exige le respect permanent de toutes les directives techniques et laisse au détenteur du véhicule le choix de décider s'il veut procéder encore ou non aux investissements nécessaires. Si cette personne ne veut ou ne peut plus le faire, le modèle est bon pour le musée.

5. Energies renouvelables

Un arrêt des centrales nucléaires ne servirait pas l'environnement, bien au contraire
L'énergie nucléaire doit être mise sur un plan d'égalité avec les énergies renouvelables du point de vue du changement climatique (CO2). La remplacer par des installations gaz-vapeur serait un pas en arrière sur le plan écologique. La remplacer par des importations d'électricité nucléaire ou à base de charbon serait en plus contraire à l'éthique. La remplacer par des économies d'énergie est une utopie - à moins que l'on envisage un renchérissement substantiel de l'énergie, ce qui, réalisé en solitaire au niveau international, est à nouveau utopique.
Il reste finalement le remplacement de l'énergie en ruban fournie par les centrales nucléaires par des énergies alternatives telles que le solaire et l'énergie éolienne, solution finalement impossible quel que soit le niveau élevé du prix de l'énergie utile. Ce n'est pas en effet la puissance installée qui est décisive, mais la disponibilité en continu justement aussi pour les besoins de pointe en hiver. L'énergie nucléaire et les énergies alternatives ne sont pas du tout des concurrentes directes, et livrent au contraire chacune un produit utile, mais complètement différent. L'espoir d'un développement accéléré des énergies renouvelables qui serait consécutif à un abandon du nucléaire est donc sans fondement. La mise à jour sans complaisance de leurs limites techniques et leurs coûts économiques élevés provoqueraient malheureusement le contraire.

6. Environnement

L'énergie n'est pas un problème environnemental en soi
Les dégâts environnementaux provoqués par le secteur de l'énergie ont tous affaire avec ce que l'on appelle les effets externes négatifs. Pour les combustibles fossiles, ce sont les émissions gazeuses nocives qui viennent ici au premier rang, pour l'énergie nucléaire, ce sont des risques non assurés ou d'éventuels coûts non préfinancés pour la gestion des déchets et le démantèlement. Contrairement à la production, le transport et l'utilisation d'électricité ne provoquent pratiquement plus de coûts externes. Une politique énergétique porteuse d'avenir sur les plans écologique et économique doit s'orienter sur une internalisation de ces coûts externes qui tienne compte des émissions. Si cette internationalisation a été réalisée par exemple par des taxes correspondantes sur les émissions, et si les prix sont ensuite "corrects", un nouvel encouragement des économies d'énergie, tout comme certaines formes d'énergie, constitueraient une exagération écologique qui serait liée à des pertes de bien-être pour la population.

Le point de vue des exploitants en cinq thèses

M. Peter Wiederkehr, président du comité des Ueberlandwerke (sociétés d'électricité d'importance nationale), président de la direction des Forces Motrices du Nord-Est de la Suisse


1. Les exploitants des centrales nucléaires suisses ne sont fixés sur aucune énergie, sur l'énergie nucléaire non plus

Parallèlement à des centrales nucléaires, ils exploitent ainsi de nombreuses centrales hydrauliques, des centrales thermiques à combustible fossile, des installations solaires et des éoliennes. Les sociétés d'électricité qui exploitent des centrales nucléaires ont un objectif clair: l'approvisionnement de la population en quantités suffisantes d'énergie à des prix avantageux. Pour remplir ce mandat d'approvisionnement, ils ont tous commencé par la force hydraulique. Lorsqu'il s'est révélé, dans les années 60, que la force hydraulique ne suffisait plus, les société d'électricité ont dû rechercher de nouvelles énergies. Ils avaient le choix entre les centrales thermiques à combustible fossile ou les centrales nucléaires. Sous la pression entre autres de la Confédération, elles optèrent pour l'énergie nucléaire. A l'heure actuelle, celle-ci couvre en moyenne 40% des besoins en électricité de la Suisse. Dans la région économique de Zurich, ce pourcentage atteint même 70% en hiver.
Les exploitants des centrales nucléaires sont des entreprises à caractère industriel et commercial. Elles exploitent donc une forme d'énergie aussi longtemps que celle-ci semble présenter un intérêt économique. Elles se tournent vers d'autres formes d'énergie si elles leur semblent plus rentables. Si les centrales solaires était économiques, elles les exploiteraient à une grande échelle. Elles n'hésiteraient pas non plus à se séparer de l'énergie nucléaire si celle-ci n'était plus compétitive. Les entreprises industrielles et commerciales produisent selon des critères industriels et commerciaux, et non pas idéologiques.

2. L'énergie nucléaire est une énergie économique et compétitive

La rentabilité d'une forme d'énergie doit se juger en fonction de valeurs moyennes, et non pas de valeurs extrêmes. C'est ainsi que Leibstadt n'est pas une valeur de référence en matière d'énergie nucléaire. Toute comme les 24 ct/kWh du prix de revient initial de la centrale d'Ilanz ne constituent guère une valeur de référence pour la force hydraulique. Le prix de revient des centrales nucléaires suisses est en moyenne compétitif. Si tel n'était pas le cas, il ne serait pas nécessaire de la combattre car elle s'éliminerait d'elle-même.
L'affirmation souvent colportée selon laquelle la force hydraulique subventionnerait l'énergie nucléaire est tout simplement une contrevérité. La centrale d'Ilanz par exemple, déjà citée, a dû être assainie par les NOK pour une somme de plus de 400 millions de francs. Ces millions sont provenus finalement aussi des recettes de la centrale nucléaire de Beznau. On ne peut pas, sous l'angle financier, jouer la carte de l'hydraulique contre celle du nucléaire, ou inversement. L'expérience montre tout simplement la réalité suivante: les centrales hydrauliques actuelles sont meilleur marché que de nouvelles centrales nucléaires, les centrales nucléaires actuelles produisent à un coût meilleur marché que de nouvelles centrales hydrauliques.

3. L'énergie nucléaire est une énergie compliquée, mais néanmoins sûre

Nous la maîtrisons. Nous pouvons le démontrer. Sont en service: Beznau et Mühleberg depuis une trentaine d'années, Gösgen depuis 20 ans, et Leibstadt depuis 15 ans. Toutes les centrales fonctionnent sans accident. Leur disponibilité figure parmi les meilleures du monde. Nous maîtrisons la technique de l'énergie nucléaire pour les raisons suivantes:

  • des systèmes de sûreté technique et de construction sont incorporés en grand nombre dans nos installations,
  • nous disposons d'un personnel hautement qualifié,
  • moyennant des dépenses considérables, nous modernisons régulièrement nos centrales nucléaires.

Ce n'est pas par hasard que la population des environs des centrales nucléaires leur témoigne une
grande confiance, comme le montrent clairement les résultats des votations. Selon les études faites à ce sujet par les autorités fédérales compétentes, les centrales nucléaires peuvent être exploitées de manière sûre pendant 50 à 60 ans.

4. L'abandon de l'énergie nucléaire en ce moment serait une décision purement politique

Un abandon anticipé du nucléaire - avant 50 à 60 ans de durée d'exploitation - ne saurait se justifier par la compétitivité ou la sûreté, puisque ces deux critères sont réunis. Malgré cette compétitivité et cette sûreté, la politique peut interdire le nucléaire si une majorité de la population exige un abandon anticipé. Il faut toutefois que les choses soient bien claires sur les conséquences d'une telle décision. L'abandon de l'énergie nucléaire signifie l'arrêt des quatre centrales nucléaires suisses. Les conséquences seront les suivantes:

  • Des milliards de pertes seront provoqués.
  • La production manquante d'électricité devra être remplacée. L'encouragement des énergies renouvelables et les économies d'énergie ne peuvent pas compenser 40 à 70% de la consommation d'électricité. Il ne faut pas oublier par ailleurs qu'on ne construit guère plus de centrales hydrauliques, les sites économiques étant épuisés.

Il existe deux possibilités de remplacer la production d'électricité manquante:

  • Nous nous procurons l'électricité manquante à l'étranger. Elle provient de centrales nucléaires ou de centrales thermiques à combustible fossile.
  • Nous construisons des installations thermiques à combustible fossile en Suisse.

Ces possibilités sont toutes les deux absurdes. Il n'est pas sensé d'arrêter des centrales nucléaires qui fonctionnent, avec comme conséquence des milliards de pertes, pour acheter ensuite de l'électricité de centrales nucléaires françaises, probablement à des prix plus élevés. On ne peut pas exiger une amélioration de la qualité de l'air et remplacer en même temps l'énergie nucléaire par des centrales thermiques à combustible fossile qui engendrent des émissions de CO2. Dans notre pays où existent de multiples voies de recours, de telles centrales ne pourraient de toute façon pas être construites en temps utile.

5. La solution raisonnable: continuer d'exploiter les centrales nucléaires existantes

Ceci aussi longtemps que leur sûreté et leur compétitivité sont garanties. Ce qui veut dire concrètement ce qui suit: les centrales fonctionnent pendant 50 à 60 ans. L'abandon du nucléaire n'a pas lieu. Cette solution présente les avantages suivants:

  • On ne gaspille pas des milliards.
  • L'approvisionnement reste assuré sans prélèvement supplémentaire d'énergie nucléaire étrangère ou d'énergie fossile à émissions de CO2.
  • On ne devra décider que dans 20 à 30 ans si de nouvelles centrales nucléaires doivent être construites à la place de celles qui seront entre temps amorties.
  • On verra au cours de cette période si des économies d'énergie auront vraiment eu lieu et dans quelles proportions, et dans quelle mesure les énergies alternatives se seront imposées.

Source

Hans Fuchs; Wolfgang Pfaffenberger; Silvio Borner; Peter Wiederkehr

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