FMB: concilier le nucléaire et les énergies renouvelables

L’«oecuménisme énergétique» appliqué BKW FMB Energie SA (FMB) est la plus grande promotrice d’électricité solaire et éolienne de Suisse. Elle exploite aussi l’une des cinq centrales nucléaires du pays. Comment Martin Pfisterer, membre de la direction de FMB et président de JUVENT SA et de la Société Mont-Soleil, juge-t-il le débat sur l’énergie nucléaire qui s’amorce? Comment assume-t-il des fonctions que certains estiment inconciliables? Il répond à nos questions.

17 avr. 2007
Martin Pfisterer, docteur en droit, avocat et notaire ainsi que consultant en relations publiques (diplôme fédéral), a occupé une fonction de chef de section à l'Office fédéral de l'aménagement du territoire avant d'entrer aux FMB au milieu de 1987. M. Pfisterer est membre de la Direction d'entreprise élargie des FMB et Chef Communication Groupe et marques.
Martin Pfisterer, docteur en droit, avocat et notaire ainsi que consultant en relations publiques (diplôme fédéral), a occupé une fonction de chef de section à l'Office fédéral de l'aménagement du territoire avant d'entrer aux FMB au milieu de 1987. M. Pfisterer est membre de la Direction d'entreprise élargie des FMB et Chef Communication Groupe et marques.
Source: FMB

Mühleberg a 34 ans. Comment cette centrale nucléaire, la plus proche de la Suisse romande, se porte-t-elle?

Vous faites bien de souligner sa proximité romande. Mühleberg est effectivement l'un des piliers de l'approvisionnement en électricité de la Suisse occidentale. La centrale se porte bien. Cela d'autant plus que le Tribunal fédéral administratif vient d'aplanir la voie à l'octroi d'une autorisation d'exploitation illimitée, comme en possèdent les quatre autres installations nucléaires du pays. Et ce n'est que justice. Mühleberg fonctionne parfaitement, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, avec un niveau de sécurité optimal.

La centrale a vieilli. Est-elle toujours aussi sûre?
Oui, la centrale est toujours aussi sûre. Nous avons constamment élevé le niveau de sécurité par les mesures d'entretien et par le renouvellement des composants. Dès que de nouveaux dispositifs de sécurité sont disponibles, nous en équipons la centrale.

Le Conseil fédéral accepte désormais l'idée de nouveaux ouvrages nucléaires. FMB est-elle prête à relever ce défi?
Oui. Il y a unanimité au sein des grandes entreprises de la branche sur la nécessité de prévoir une capacité nucléaire de l'ordre de 3 000 mégawatts pour les années 2020-2030. Les deux ou trois centrales nécessaires seront construites sur des sites nucléaires existants. Ce pourrait être Mühleberg, Beznau ou Gösgen. Nous allons procéder à une évaluation complète de la capacité de Mühleberg pour accueillir une future grande centrale; elle aurait en particulier pour mission de garantir la sécurité d'approvisionnement en Suisse occidentale.

Le peuple suisse sera tôt ou tard appelé à s'exprimer sur la construction de nouvelles centrales nucléaires. Quelles sont les conditions de l'acceptation populaire de nouveaux projets?
La stratégie du Conseil fédéral est la bonne. Elle consiste à démontrer dans un premier temps que tout est fait, et sera fait, pour valoriser le potentiel d'économies, l'utilisation rationnelle de l'énergie et la promotion des énergies renouvelables. Mais pour répondre aux besoins en électricité qui ne cessent d'augmenter, le recours à de nouvelles centrales de production à haut rendement s'impose. L'électricité est le nerf de notre économie. Il n'y a pas de sauvegarde possible de nos acquis en qualité de vie, en services, en capacités industrielles et hospitalières dans un pays qui viendrait à manquer d'électricité.

Comment la Suisse romande peut-elle contribuer aux efforts pour la sécurité d'approvisionnement de demain?
Elle ne manque pas d'atouts. On pourrait encore mieux valoriser la force hydraulique. La Suisse romande pourra, jusqu'à ce que les nouvelles centrales nucléaires soient disponibles, jouer un rôle majeur dans la création d'une capacité de production à partir du gaz naturel, avec les projets de Chavalon et Cornaux notamment. Le moment venu, elle devra s'associer à la construction des nouvelles centrales nucléaires en participant à la décision populaire. Les entreprises électriques, de la plus grande à la plus petite, devront être elles aussi solidaires et informer le public de manière ciblée.

L'avenir des centrales à gaz ne paraît pourtant pas très brillant…
Il est vrai que le Parlement vient de prendre des décisions défavorables en termes de compensation des rejets de gaz carbonique. Pouvait-on s'attendre à autre chose dans le contexte climatique actuel? Il n'y a pas de solution parfaite. Mais la pire des situations reste à mes yeux la perspective d'une pénurie d'électricité. Jusqu'à l'entrée en service des nouvelles centrales nucléaires, il nous faut pouvoir disposer d'autres unités de production à haut rendement comme solution transitoire.

Votre entreprise a une vocation internationale. Vous investissez notamment dans des centrales à gaz dans des pays voisins. Cette production étrangère contribue-t-elle à l'approvisionnement de la Suisse?
Nous avons effectivement acquis des capacités de production ou de tels projets en Italie et en Allemagne. La première vocation de ces ouvrages est d'alimenter les marchés de nos clients dans ces pays. L'importation en Suisse, pour autant qu'elle soit matériellement possible, ne viendra qu'en seconde position. Il faut se rappeler qu'un marché européen viable exige que chaque pays soit en principe autosuffisant en termes d'approvisionnement. Sur la durée, les importations ne sont pas une solution. A cela s'ajoute le fait que nos pays voisins, France comprise, sont eux aussi confrontés à un resserrement de leurs capacités de production.

On oppose régulièrement dans les débats le nucléaire aux nouvelles sources d'énergie renouvelables. Or vous êtes, en votre qualité de président des sociétés JUVENT et Mont-Soleil, le plus grand promoteur d'électricité éolienne et photovoltaïque de Suisse. Comment conciliez-vous cette double casquette nucléaire et renouvelable?
Cessons d'opposer les énergies les unes aux autres ! La Suisse a la chance de disposer d'un solide pilier composé d'électricité hydraulique et nucléaire. Cette base nous a permis de poursuivre nos efforts de recherche et de développement dans les nouvelles technologies. Nous devons être présents sur ces marchés et sauvegarder le savoir-faire que nous y avons acquis. La récente décision du Parlement de soutenir cet effort est la bienvenue. Il faut poursuivre la recherche, le développement et l'exploitation dans ces domaines. De telles mesures pourraient porter leurs fruits dans un avenir proche.

Certes. Mais la part du solaire et de l'éolien dans la production d'électricité atteint aujourd'hui un demi pour mille alors que la consommation annuelle augmente de près de 2%. Que faut-il faire pour augmenter de manière substantielle le pourcentage de ces deux sources d'énergie?
Dans l'état des connaissances actuelles, ce sera difficile. En raison de ses caractéristiques climatiques et topographiques, la Suisse n'est a priori pas propice au solaire photovoltaïque et à l'éolien. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne continuera pas à pousser le développement et l'exploitation des nouvelles technologies renouvelables, y compris la biomasse et la géothermie.

Face à la menace de pénurie électrique, le Conseil fédéral prône la complémentarité des énergies, plutôt que l'exclusion de l'une ou de l'autre. Cette position «œcuménique» a-t-elle une chance de se substituer à la confrontation dans le débat énergétique?
Le Conseil fédéral a donné une bonne impulsion. Il revient désormais à la branche et à ses communicateurs d'expliquer les enjeux sans relâche. Dans le meilleur des cas, les nouveaux ouvrages nucléaires n'entreront pas en service avant les années 2020-2030. Or nous sommes aujourd'hui déjà à la limite de nos capacités. Tous les scénarios s'accordent sur les risques de rupture d'approvisionnement dès les prochaines années. Les efforts dans les domaines des économies et des nouvelles technologies sont indispensables et l'exploitation de centrales à gaz représente la solution intermédiaire idéale.


Propos recueillis par Jean-Pierre Bommer

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