La CIPR lance la discussion sur un nouveau concept de protection radiologique

Il y a dix ans, la Commission Internationale de Protection Radiologique CIPR avait lancé le débat sur les recommandations qui, une année plus tard, devaient devenir la base (Publication 60 de la CIPR) d'un renforcement des prescriptions de radioprotection dans plusieurs pays, dont la Suisse, mais que de nombreux scientifiques remettent dernièrement de plus en plus en question, surtout en France et aux Etats-Unis.

29 juil. 1999

Les scientifiques regrettent d'une part que pour les faibles doses, les recommandations de la CIPR se fondent sur un taux trop élevé de déclenchement de cancer; ils reprochent d'autre part à la CIPR de ne pas tenir compte de découvertes récentes en matière de biologie moléculaire et de négliger les conséquences de l'instabilité génétique persistante radioinduite. La CIPR s'est donc remise à l'ouvrage et propose maintenant à la discussion un concept de radioprotection entièrement nouveau. Ce concept a été publié par son président, M. Roger Clarke, directeur du National Radiological Protection Board (Journal on Radiological Protection, vol. 19, no 2, pages 107 à 115).
Dans sa publication, M. Clarke rappelle tout d'abord les limites des études épidémiologiques qui ne permettent pas, en cas d'expositions cumulées inférieures à quelques centaines de milligrays (mGy), de tirer des conclusions directes. Il admet que certaines études de biologie moléculaire sont allées un peu plus loin et donnent une idée sur les processus complexes des lésions génétiques par irradiation et des mécanismes de réparation déclenchés. Mais ces études ne suffisent pas non plus pour établir une relation dose/effets exacte avec des doses très faibles. Comme le souligne encore M. Clarke, la question de la valeur seuil reste sans réponse. On se trouve par ailleurs confronté à la tâche d'établir des prescriptions de radioprotection consistantes en soi dont l'application doit être la plus simple possible. Vue sous cet angle, l'introduction de valeurs seuils devrait conduire dans la pratique à des situations tout aussi difficiles que l'application crédule du concept utilisé actuellement d'une dose collective lorsque l'on extrapole les conséquences de doses infinitésimales sur des groupes de population d'une quelconque grandeur, ceci pour des périodes géologiques, ou lorsque l'on considère les valeurs limites comme absolument impératives. La CIPR s'est déjà penchée sur cette question dans sa publication 77. On constate souvent à l'heure actuelle une certaine confusion dans la radioprotection surtout en ce qui concerne la différence entre la pratique et l'intervention lors de mesures post-accidentelles, et donc aussi pour ce qui est des différences en vigueur entre les irradiations professionnelle, médicale et générale.
Pour résoudre ce problème, la CIPR a réfléchi sur la mission véritable qui incombe à la radioprotection, à savoir la protection de tout un chacun contre les conséquences sanitaires d'une irradiation excessive. Ceci s'obtient concrètement en maintenant à un niveau aussi bas que ceci est raisonnablement praticable la dose contrôlable, c'est-à-dire la somme de toutes les doses auxquelles un individu est exposé à partir d'une source particulière et qui peut être influencée par quelque mesure que ce soit. Le concept de la dose contrôlable, c'est-à-dire de la dose à surveiller et à influencer, se fonde sur une philosophie orientée davantage sur l'individu, et il est à la base de la recommandation de la CIPR d'abandonner définitivement le concept de la dose collective: si le risque sanitaire de l'individu le plus irradié est trivial, ceci s'applique au risque global d'un groupe de personnes, quelle que soit sa grandeur. Comme le souligne la CIPR dans sa proposition, il continuera naturellement d'exister des doses lors du dépassement desquelles des mesures seront inévitables. Le tableau ci-dessous donne une vue d'ensemble de ces doses. Continuera également de s'appliquer le principe selon lequel toute irradiation doit se justifier par une utilité pour l'individu et la société et ne peut intervenir que s'il n'y a pas d'autre possibilité d'obtenir cette utilité. Les deux autres principes actuellement en vigueur, à savoir le principe Alara (as low as resonably achievable) et l'optimisation, seraient relativisés par l'introduction de la dose contrôlable, et même sans cela, il y aurait des possibilités de simplifications considérables dans la pratique.

Source

P.B./C.P. d'après "Control of low-level radiation exposure: time for a change" de R. Clarke, juillet 1999

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