Mobilité électrique: le transport individuel devient électrique

Explosion des prix du pétrole, villes géantes et pollution de l’air: tous ces facteurs donnent un coup de pouce aux véhicules électriques. Les grands constructeurs automobiles s’y intéressent toujours plus, ainsi que le démontrera très bientôt le 80e Salon international de l’auto à Genève (du 4 au 14 mars 2010). L’électricité produite en Suisse étant quasiment exempte de de de CO2, les véhicules électriques et les voitures hybrides représentent de véritables solutions alternatives.

18 févr. 2010

L’offre de voitures électriques s’est longtemps cantonnée à quelques créneaux du marché. Mais les choses vont changer. Toute une série de grands constructeurs automobiles ont annoncé que certains de leurs modèles électriques seraient bientôt prêts pour une fabrication en série. Les sourires moqueurs face à ce type de véhicules appartiennent désormais au passé.

Le Salon de l’auto de cette année à Genève réservera beaucoup de place aux véhicules électriques et aux modèles hybrides. Le premier Forum suisse de la mobilité électrique qui s’est déroulé les 26 et 27 janvier 2010 au Musée suisse des transports à Lucerne prouve bien que l’heure est venue. La manifestation a été parrainée par le Touring Club Suisse, l’Office fédéral des routes, Nissan et Swisselectric (Alpiq, Axpo, FMB).

Percée dans les grandes agglomérations

Une étude McKinsey annonce un boom des voitures électriques et hybrides au cours des prochaines années. Selon Christian Malorny, expert de McKinsey pour les questions de mobilité, l’industrie automobile fait cap sur une nouvelle ère. Les conseillers d’entreprise escomptent un potentiel du marché mondial pouvant atteindre 700 milliards de francs suisses pour les voitures électriques et les modèles hybrides et hybrides «plug-in». Alors que les voitures tout électriques sont équipées d’une propulsion électrique, les modèles hybrides sont aussi dotés d’un moteur à combustion. Quant aux véhicules plug-in, leur batterie électrique est rechargeable sur une simple prise de courant domestique.

Dans les grandes agglomérations de New York, Shanghai et Paris, les véhicules électriques et hybrides devraient s’imposer d’ici cinq ans déjà, en tant que solution réaliste pour remplacer les voitures équipées de moteurs à combustion traditionnels. Toujours selon McKinsey, c’est à New York que le marché des voitures électriques sera le plus florissant: le pourcentage estimé des nouvelles mises en circulation devrait, en l’espèce, friser les 16% en 2015, suivi par Paris avec une part de 9% et Shanghai avec 5%. Le potentiel des voitures 100% électriques est le plus grand à New York. Les voitures citadines électriques pourraient, selon l’étude McKinsey, représenter 6% des immatriculations en 2015.

La question des «stations-service» ou stations de recharge joue un rôle subordonné dans les mégapoles. Les acheteurs potentiels de véhicules électriques se préparent, selon les sondages, à la possibilité de recharger leur voiture à la maison ou au parking couvert. «Les conducteurs se feront tout naturellement à l’idée qu’ils doivent, à chacun de leurs déplacements, veiller à rentrer à la maison», estime Christian Malorny. Il n’est pas exclu lors d’une prochaine étape que des entreprises de service ou des maisons commerciales - les supermarchés, les parkings couverts ou les restaurants, p. ex. - créent des stations de recharge spécialement destinées à leur clientèle. Les grandes entreprises devraient, par ailleurs, mettre l’infrastructure requise à la disposition de leur personnel. Les chargeurs à poste fixe le long des routes ne s’imposeront que lors d’une étape ultérieure, c’est-à-dire au moment où les voitures électriques deviendront une option privilégiée dans les régions rurales également.

Concilier la mobilité et la protection de l’environnement

Prise isolément, l’industrie automobile allemande devrait, afin de satisfaire aux valeurs limites CO2 fixées par l’UE à l’horizon 2020, prévoir sur son marché européen des coûts supplémentaires d’environ 43 milliards de francs suisses pour le développement et de 125 milliards pour la production. Or en vendant des modèles électriques, les fabricants automobiles pourraient réduire considérablement les coûts.

«L’homme attache une importance toujours plus grande à sa mobilité individuelle», souligne Thomas Straubhaar, professeur au Welt-Wirtschafts-Institut (HWWI; Institut d’études économiques internationales) de Hambourg. Cette tendance haussière pèse en particulier sur les villes et entraînera à long terme un accroissement sensible des émissions de CO2. Et il précise: «L’industrie automobile est donc mise au défi de développer des concepts pour faire face au problème.» Le HWWI a examiné un certain nombre de stratégies en collaboration avec la Behrenberg Bank. Les besoins de mobilité toujours croissants et le changement climatique pousseront la branche automobile au changement. Jusqu’ici, les coûts élevés liés au développement des moteurs, des boîtes de vitesses et des systèmes de propulsion avaient fermé la porte aux nouveaux venus sur le marché. Mais la voiture électrique s’est simplifiée; plus besoin de boîtes de vitesses, et les nouveaux fabricants peuvent acquérir batteries et moteurs auprès de fournisseurs tiers. Les grands constructeurs automobiles ont entre-temps conclu des partenariats technologiques, par exemple Renault-Nissan avec NEC, Daimler avec Evonik, BMW avec Bosch/Samsung et le groupe VW avec Sanyo. «Selon l’état actuel des connaissances, la technologie au lithium offre les meilleures perspectives pour les batteries des futures générations de modèles électriques et hybrides. Le plus gros potentiel d’innovation réside dans l’amélioration de l’autonomie, de la densité énergétique, de la sûreté et du temps de recharge ainsi que dans la forme et les dimensions», conclut l’étude du HWWI et de la Behrenberg Bank.

Ecarts dans les prévisions

Les prévisions des tendances en matière de véhicules électriques font cependant apparaître d’importantes disparités. L’Agence internationale de l'énergie (AIE) considère que c’est la circulation routière qui recèle le plus grand potentiel d’économies, au sens d’une réduction massive des émissions de CO2. Le scénario ambitieux de 450 ppm formulé dans le World Energy Outlook 2009 repose sur l’hypothèse qu’en 2030, seuls 40% des voitures vendues dans le monde seront encore dotées de moteurs à combustion, les autres 60% étant constitués de voitures hybrides ou entièrement électriques.

Or les estimations actuelles de la branche automobile pour les années 2025 ou 2030 admettent toujours une part dominante de moteurs à essence et de moteurs diesel: selon elle, plus de 90% des ventes concerneraient ces véhicules conventionnels, mais en partie fortement optimisés. Ulrich Hackenberg, chef du développement chez VW, s’attend pour 2020 au pourcentage modeste de 1,5 à 2% sur le marché mondial des voitures électriques. Ce genre de véhicules concerne surtout les grandes villes. Et selon lui, «les voitures électriques représenteront un créneau sur le marché, mais tout créneau peut être développé.»

On sait d’ores et déjà que la demande d’électricité pourrait bien enregistrer une hausse en tant que forme d’énergie privilégiée. Le 26 janvier 2010, le conseiller Moritz Leuenberger s’est adonné à la réflexion suivante lors du premier Forum suisse de la mobilité électrique, à Lucerne: «Le parc de voitures personnelles compte actuellement quelque 4 millions de véhicules en Suisse. Si toutes ces voitures étaient équipées de moteurs électriques, les besoins totaux en électricité augmenteraient d’un cinquième dans notre pays. «Si ce courant était d’origine nucléaire, la production requise équivaudrait à 1 fois et demie la puissance de Gösgen. En termes d’énergies renouvelables, il faudrait quelque 3200 éoliennes ou 9300 installations solaires, occupant chacune une surface comparable à celle du Stade de Suisse, à Berne».

Conclusion

Il faut s’attendre pour l’avenir à la persistance d’un pétrole cher et, par là, de coûts élevés du carburant. Ce qui favorisera la tendance en faveur des véhicules électriques. Les améliorations touchant la technologie des batteries, la mise en place de stations de recharge et les prix de vente devraient stimuler les ventes. «La tendance dans le secteur automobile s’engage clairement vers la propulsion électrique», souligne Peter de Haan, professeur à l’EPF de Zurich pour les questions d’énergie et de mobilité. Les moteurs électriques se passent de boîte de vitesses et de marche arrière, et leur courbe de couple est très bien adaptée à la propulsion d’une voiture, avec une importante disponibilité dès le démarrage. Transmission 4x4, différentiel, systèmes de freinage antiblocage ABS et d’anti-dérapage EPS peuvent ainsi facilement être reportés sur les voitures électriques.

C’est surtout dans les agglomérations très peuplées que les milieux politiques auront intérêt à créer des incitations (fiscales) pour favoriser les voitures citadines électriques. La réduction des rejets de dioxyde de carbone reste un objectif majeur des gouvernements en dépit de l’échec de la Conférence sur le climat de Copenhague. Dans des pays comme la Suisse où l’électricité est produite à partir d’agents exempts de CO2, les voitures électriques bénéficieront encore davantage des faveurs des automobilistes et des défenseurs politiques de l’environnement. Car une chose est certaine: le besoin de mobilité subsistera.

Source

Hans Peter Arnold/P.V.

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