Pas de soleil sans gaz et pétrole

Il en coûterait quelque 62 milliards de francs à l'économie nationale suisse si les centrales nucléaires étaient arrêtées de manière anticipée conformément à ce que prévoit l'initiative "Sortir du nucléaire" et étaient remplacées par une utilisation forcée de la photovoltaïque et de l'énergie éolienne. De plus, quand il n'y a pas de soleil et de vent, il faudrait produire neuf kilowattheures par du gaz ou du pétrole en complément de chaque kilowattheure d'origine solaire ou éolienne.

15 janv. 2001

Tels sont les résultats d'une étude globale présentée aujourd'hui à Berne, étude élaborée sous la direction du Professeur Pfaffenberger par l'Institut de l'énergie de Brême à la demande des centrales nucléaires suisses de Beznau, Mühleberg, Gösgen et Leibstadt. En cas d'abandon selon l'autre initiative "Moratoire-plus", l'étude chiffre les coûts à quelque 46 milliards de francs. Comme l'a indiqué le Professeur Silvio Borner, du Centre des sciences économiques de l'Université de Bâle, un arrêt des centrales nucléaires et leur remplacement par une combinaison d'énergies renouvelables forcées, d'économies d'énergie forcées et par le couplage chaleur-force, serait possible, mais seulement à un prix économique et écologique énorme.
Ce travail fait suite à une étude élaborée par le même Institut et présentée il y a un an; cette étude avait analysé la variante la meilleur marché de remplacement de l'électricité nucléaire, à savoir par des centrales à gaz à émissions de CO2, variante dont elle avait chiffré le coût à 40 milliards de francs avec le scénario "Sortir du nucléaire" et à 29 milliards de francs avec "Moratoire-plus".
Lors de la conférence presse, le Professeur Borner a souligné par ailleurs à propos des coûts que la libéralisation du marché européen de l'électricité ne s'arrêtera pas aux frontières suisses.
Du fait du renchérissement considérable de la production d'électricité qu'elles provoqueraient, les variantes présentées dans l'étude devraient transformer la Suisse en une "île du prix de l'électricité". Celle-ci ne pourrait pas résister à l'assaut de la concurrence internationale, à moins de construire un mur de protection avec de nouvelles réglementations et subventions, ce qui entraînerait encore une fois des coûts supplémentaires pour l'économie nationale.
"La raison d'utiliser des agents énergétiques renouvelables en particulier est l'amélioration du bilan environnemental. Etant donné toutefois que l'énergie nucléaire ne donne lieu à aucune émission de CO2 ou d'oxydes d'azote et qu'en cas d'utilisation d'énergie renouvelable, il faut employer une quantité considérable de gaz dans des installations à couplage chaleur-force, il s'ensuit là aussi des coûts de réduction supplémentaire du CO2 par rapport à l'utilisation de l'énergie nucléaire. Ces coûts atteignent quand même encore la moitié environ de ceux qu'engendrerait le remplacement le plus avantageux des centrales nucléaires par des centrales à gaz", constate le Professeur Pfaffenberger dans les conclusions de la nouvelle étude.
Celle-ci analyse pour l'essentiel ce qui se passerait si, en cas d'abandon éventuel de l'énergie nucléaire en Suisse, l'électricité manquante était produite dans la plus large mesure possible par des agents énergétiques renouvelables tels que le soleil et le vent. Des mesures renforcées d'économie devraient permettre par ailleurs de diminuer la consommation d'électricité.
Le groupe Pfaffenberger a analysé ici deux variantes: la première prévoit une expansion forcée de la photovoltaïque jusqu'à une puissance de trois millions de kilowatts, ce qui correspond à peu près à la puissance actuelle des centrales nucléaires suisses.
Viendrait s'y ajouter une expansion de l'énergie éolienne jusqu'à un million de kilowatts. Comme alternative à la photovoltaïque, la deuxième variante étudiée est une amélioration forcée de l'efficacité d'utilisation de l'électricité. En cas d'utilisation de la photovoltaïque et de l'énergie éolienne, il faut toutefois considérer que ces agents énergétiques fournissent des contributions très fluctuantes à l'approvisionnement en énergie qui sont fonction des conditions naturelles.
Pour garantir l'approvisionnement en électricité, une compensation doit donc être assurée par des installations supplémentaires. L'étude prévoit ici des installations à couplage chaleur-force. La mise à profit des capacités de production d'électricité des agents énergétiques renouvelables est relativement faible en Suisse et dépend de la durée d'ensoleillement et de la force du vent. La disponibilité annuelle pour le soleil est d'environ 10%, et de 12% pour le vent. Une production d'énergie continue correspondant aux désirs des consommateurs exige donc des contributions supplémentaires considérables du couplage chaleur-force.
Ces facteurs font qu'un abandon du nucléaire en Suisse entraînerait des coûts supplémentaires élevés par rapport à la poursuite de l'exploitation des centrales nucléaires. Si ces centrales nucléaires sont remplacées par une expansion forcée de la photovoltaïque et de l'énergie éolienne, le coût total de l'abandon atteindra jusqu'à 62,1 milliards de francs d'ici 2045, selon la variante d'abandon choisie. Si on force l'utilisation plus efficace de l'électricité par des investissements dans des techniques d'application améliorées, le coût de l'abandon du nucléaire atteindra jusqu'à 47,6 milliards de francs. Et dans le cas où les centrales nucléaires seraient remplacées de manière anticipée par des centrales à gaz (cette variante la meilleur marché a été présentée il y a un an dans la première étude Pfaffenberger), le coût de l'abandon atteindra toujours jusqu'à 40,1 milliards de francs.
On peut lire à ce sujet dans l'étude Pfaffen-berger que les trois variantes d'abandon du nucléaire (y compris la variante prévoyant une utilisation élevée de la photovoltaïque et de l'énergie éolienne) se traduiraient par un bilan écologique bien plus mauvais (émissions de CO2 et d'oxydes d'azote) que le cas de référence avec lequel les durées de vie des centrales nucléaires de 50 ans (Beznau, Mühleberg) à 60 ans (Gösgen, Leibstadt) sont pleinement mises à profit. Le risque du prix du gaz et les coûts de réduction supplémentaire d'émissions sont plus faibles en cas d'utilisation d'énergies renouvelables et/ou d'amélioration de l'efficacité énergétique qu'en cas de remplacement des centrales nucléaires par des centrales à gaz. Globalement, les coûts de l'abandon du nucléaire seront toutefois alors considérablement plus élevés. Les économies d'énergie sont meilleur marché que l'utilisation de l'énergie photovoltaïque à grande échelle.
L'étude de Brême a été commandée par les exploitants des centrales nucléaires suisses dans le but de faire estimer par un organisme renommé et indépendant, spécialisé dans l'économie énergétique, les conséquences des initiatives fédérales en suspens "Sortir du nucléaire" et "Moratoire-plus".
Le porte-parole du comité énergie nucléaire (UAK) des Ueberlanwerke (sociétés d'électricité d'importance nationale), M. Hans Fuchs, a tiré la conclusion suivante à la conférence de presse: la nouvelle étude montre qu'en termes de puissance, on pourrait effectivement remplacer les centrales nucléaires par des installations photovoltaïques, mais que malgré des coûts énormes de 50 à 60 milliards de francs, la production d'électricité solaire ne correspondrait qu'à la production d'électricité de la centrale nucléaire de Mühleberg à peu près, ce qui veut dire qu'en dépit de cette "solarisation" extrême, les centrales de Beznau, Gösgen et Leibstadt seraient remplacées par du gaz et du pétrole. Qui sème le soleil récolte gaz et pétrole, a constaté M. Fuchs.

Source

Communiqué de presse des centrales nucléaires suisses du 16 janvier 2001

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