Ségolène Royal veut fermer Fessenheim: menace pour la Suisse dès 2007?
Ségolène Royal n’aime pas le nucléaire. Une fois élue, la candidate socialiste à l’élection présidentielle française fermerait rapidement la centrale de Fessenheim, aggravant du même coup les menaces qui pèsent sur l’approvisionnement de la Suisse en électricité.
Lors de son premier discours de campagne prononcé au mois de janvier dans l'Allier, la candidate du PS a commencé par dire toute l'inquiétude que lui causaient les menaces climatiques. Et puis elle est rapidement passée à un domaine plus concret: «Il faut avoir le courage de programmer une action progressive d'extinction des centrales nucléaires anciennes et les plus dangereuses!»
Autrement dit, à ses yeux, toutes les centrales nucléaires sont dangereuses, les anciennes l'étant plus que les récentes. Pour faire bonne mesure, elle promet une reconnaissance du rôle joué par les associations de protection de l'environnement en tant qu'auxiliaires du service public, avec la création d'un statut de bénévoles. Des associations, précisent-elles, qui «feront leur entrée dans les comités d'entreprises», entreprises auxquelles elle appliquera le principe du pollueur-payeur.
Le syndrome Jospin
A peine Ségolène Royal avait-elle annoncé publiquement sa volonté de réduire la part de l'atome dans les approvisionnements futurs, que l'association «Sortir du nucléaire», apparemment bien informée sur les projets de la candidate, publiait un programme de fermetures échelonnées entre 2007 et 2020 de trente-quatre réacteurs, précisant qu'il s'agissait d'un plan «modéré», sans «rupture brutale».
Le conseiller de la candidate socialiste pour les questions industrielles et environnementales étant l'ancien porte-parole de Greenpeace France, Bruno Rebelle, le sort de l'EPR paraît désormais lui aussi mal engagé. Le nouveau réacteur de troisième génération franco-allemand, dont le premier exemplaire français devrait être construit sur le site de Flamanville, pourra-t-il survivre à une telle vague de démantèlement des ouvrages existants?
On appréhende au sein même du parti socialiste une répétition du marché de dupes qui avait conduit, il y a huit ans, Lionel Jospin à s'assurer le soutien des Verts en sacrifiant le surgénérateur Superphénix, anéantissant du même coup l'avance que la France avait acquise dans le développement des réacteurs de quatrième génération. Des proches de la candidate des Verts, Dominique Voynet, ont laissé entendre que l'abandon de l'EPR sera le prix de son ralliement à Ségolène Royal en vue du second tour électoral.
Résistance socialiste
Ce programme de rupture, dont même les Verts n'auraient pas osé rêver, n'a pas ému grand monde jusqu'ici. Les médias restent davantage intéressés par la couleur des tailleurs et par le compte en banque de la candidate, que par ses propositions qui engagent l'avenir du pays. Même EDF n'a pas jugé utile de réagir.
Curieusement, les seuls signes de résistance émanent du parti même de Mme Royal L'ancien ministre Jean-Pierre Chevènement aurait exprimé ses réserves en petits comités. Le député du Nord, Christian Bataille, a énuméré quant à lui sur le site Internet de l'Assemblée nationale toutes les raisons qui militent en faveur du maintien du parc nucléaire: «Aucune raison technique ne justifie l'arrêt de l'un des 58 réacteurs en activité avant 40 années de service, ni à Fessenheim ni ailleurs». Et d'ajouter qu'au moindre incident météorologique un peu aigu, la France se retrouvait aujourd'hui déjà en situation de rupture d'approvisionnement.
Le risque énergétique sera-t-il écarté avec l'élection de Nicolas Sarkozy? Pas sûr! Tout en restant jusqu'ici dans le vague, le candidat de la droite a lancé lui aussi des signaux très clairs pour rallier des électeurs de sensibilité verte, en adhérant notamment au «Pacte» de Nicolas Hulot, cet animateur de télévision érigé au rang de conscience écologique du pays. Dans un article paru dans Les Echos, son conseiller pour les affaires environnementales, l'ancien ministre Michel Barnier, parlant de l'électricité, prône le développement des éoliennes et la nécessité d'adapter le réseau à cette production décentralisée. Pas un mot sur le nucléaire ni l'hydraulique, qui couvrent respectivement 80% et 15% des besoins du pays.
C'est peu dire que l'élection qui s'approche sera lourde de menaces pour l'approvisionnement de la France, et par voie de conséquence pour notre pays également. Souvenez-vous! Dans l'impossibilité politique de construire de nouveaux ouvrages dans les années 80, les électriciens suisses avaient pris des participations importantes dans la production de deux des centrales qui figurent dans le programme de fermeture de Ségolène Royal. Fessenheim et Bugey fournissent à notre pays près de huit milliards de kilowattheures par année, soit l'équivalent de 15% de notre consommation.
Normalement, cette contribution devrait subsister jusque vers 2018-2020, sauf en cas de fermeture prématurée des centrales. Un cas de figure qui prend désormais un tour concret. Cette situation illustre le risque résultant d'une dépendance excessive de l'étranger dans le domaine de l'énergie. A la dépendance pétrolière et gazière, nous avons ajouté celle de l'électricité.
La Suisse a décidément de bonnes raisons de ne pas se désintéresser de la prochaine élection française.
Quelle
J.B.